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Ma station 136 kHz
Par f4guk 15 novembre 2021 dans : LW, Labo
 

Lorsqu’il m’arrive de parler sur les ondes de ma station d’émission / réception sur la bande des 136 kHz, mes correspondants me disent parfois qu’ils aimeraient bien voir à quoi elle ressemble. Et là, c’est le drame: je me rend compte que j’ai bien publié des photos de « morceaux » de la station, ici et là, mais rien de global. Il faut qu’ils cherchent par eux-même, qu’ils farfouillent dans les pages du blog, ou sur ma page QRZ.com. Bref, il faut bien avouer que c’est compliqué.

Alors, je rédige cet article afin d’avoir une page vers laquelle les envoyer pour qu’ils en découvrent d’avantage sans se perdre en route !

J’ai de multiples choix pour générer et recevoir des signaux 136 kHz (en direct ou via transverter), mais pour ne pas rendre cet article inutilement compliqué, je vais faire au plus simple: nous allons dire que ce que je vous présente là est l’une des configurations possible de ma petite station LF. Elle ne sera évidemment pas choisie au hasard, car c’est aussi l’occasion rêvée de vous faire part de quelques tests décevants. Autant que ça serve à tous…

Premiers éléments : le transceiver et son transverter.

Station 136 kHz
Icom IC-9100 et transverter

Pour les non initiés à la radio qui pourraient venir se perdre par ici (les pauvres !), un « transceiver »: c’est le terme anglais pour définir un appareil qui fait à la fois émetteur et récepteur.

Un « transverter » quand à lui, c’est un convertisseur qui va « transformer » une fréquence en une autre (et généralement réciproquement).

Les émetteurs radioamateurs du commerce n’ont pas la possibilité de transmettre directement un signal sur le 136 kHz.

La solution du transverter ajouté derrière l’émetteur peut donc paraitre très attractive pour le non bricoleur, d’autant qu’il existe un fabricant sur le marché: Monitor Sensors.

Seulement attention: déjà son prix d’achat neuf assez élevé : + de 650 Euro, prix qu’il faudra au moins multiplier par deux (avec les frais de port et taxes diverses) si vous l’achetez directement chez eux, en Australie.

Ensuite, vous allez peut-être vous retrouver avec un appareil qui pourrait ne pas vous convenir:

- Avec juste 50W de sortie au maximum (si votre charge rayonnante est bien accordée), ne comptez pas faire des prouesses côté distances de transmission, surtout sur 136 kHz: il vous faudra amplifier votre signal.

- Ensuite, en fonction des modes de transmission que vous utiliserez, sa stabilité aléatoire ne conviendra tout simplement pas !

Si les modes WSPR, JT9 (normal) et FST4W 120s et 300s sont possibles (avec parfois des fortunes diverses), oubliez totalement les modes les plus performants dont la bande passante est plus réduite et le temps de transmission plus long, tels que les WSPR 15, FST4W 900s et 1800s : lorsque son oscillateur monte en température, il glisse en fréquence, rendant impossible le décodage de votre signal transmis.

Le constructeur en est conscient, puisqu’il propose désormais un kit de modification : il vous faudra donc rajouter 100 Euros de plus à votre achat avec des composants « CMS » à changer. Un vrai bonheur…

- Enfin, s’il est prompt à vous répondre pour une commande, ne comptez pas sur le constructeur pour vous aider avec une valeur de composant interne à changer ou si votre mise à jour de firmware ne fonctionne pas.

J’ai aussi pu mettre la main sur une version 630m de leur transverter et là, c’est encore pire : son impédance de sortie n’était même pas à 50Ω. Il m’a fallu le modifier pour qu’il fonctionne et là encore la stabilité en fréquence n’y est pas. L’oscillateur dévie en fréquence, lui aussi. Même motif, même punition.

Bref, ne pensez donc pas que le transverter de chez Monitor Sensor soit une solution « clef en main » pour être pleinement opérationnel sur ces bandes « exotiques », car hélas, vous pourriez être déçus.

Mais peut-être que certains d’entre vous, ont eu un meilleur retour ? Auquel cas, n’hésitez pas à me le faire savoir en commentaire.

En tout cas, il est clair que s’il faut bricoler du matériel du commerce pour que ça fonctionne, autant construire quelque chose soi même, ça coûtera largement moins cher.

Un excitateur sur le 160m

Le transceiver utilisé pour ma station 2200m est souvent un IC-9100, en puissance mini (200 mW environ), réglé sur 1.806 USB :

Station 136 kHz
Icom IC-9100

Cette la sortie d’antenne passe par un premier sélecteur d’antennes manuel, qui me permet de choisir vers quoi j’envoie le signal :

Station 136 kHz
Selecteur d'antenne

Le transverter 160m <> 2200m

Vous aurez compris que ce qui se passe sur son entrée en 1.806 MHz est transmis sur 136 kHz et réciproquement.

Ma puissance de sortie du signal 136 kHz du transverter est alors généralement de 1.5 W.

Là, sur l’image avec 1.75W, je suis proche de la saturation de l’ampli en cas de dérèglement de l’antenne.

Station 136 kHz
Transverter 2200m

Commutation relais 1

Le signal passe alors à travers un premier système de relais, qui va l’orienter soit vers l’ampli, soit vers un autre relais, situé après l’ampli. Cette commutation est assurée automatiquement par l’IC-9100 via l’entrée « Control ».

Le signal de sortie est atténué au passage de 20dB (atténuateur Narda 766-20) soit une division par 100 de la puissance:

Station 136 kHz
Premier relais

Il reste donc moins de 20mW de signal 136 kHz, que l’on va guider vers un adaptateur d’impédance 50Ω vers haute impédance (l’entrée de l’ampli est à 47 kΩ) qui servira également de filtre dans le but d’empêcher qu’une fréquence audio soit amplifiée (genre du 50 Hz, vous voyez ?). La boite est en plastique, mais un sérieux blindage en feuille de cuivre est présent à l’intérieur.

Station 136 kHz
Entrée Hafler P3000 - source WD2XES

Station 136 kHz
Adaptateur entrée

L’amplificateur

Voici le signal 136kz qui est prêt à être amplifié par l’ampli HiFi Hafler P3000 non modifié.

Les caractéristiques constructeur donnent une atténuation maximale de 3 dB à 300 kHz: il n’y a donc rien à modifier pour du 136 kHz.

Les audiophiles ont décidément de bien meilleures oreilles que les chauves-souris !

Mes mesures confirment sensiblement ces données (je ne parle évidemment pas des audiophiles, mais de la courbe d’amplification de l’appareil !).

Au dessus de 300 kHz, l’amplification diminue véritablement, mais il peut tout de même sortir plusieurs dizaines de Watts sur la bande des 472 kHz / 630m. Il faudra juste prévoir la construction d’un filtre spécifique pour cette bande.

Le P3000 est configuré en bridge / mono et il peut être aidé par deux ventilateurs lors des longues sessions de transmission. Il peut tenir ainsi plusieurs heures en pleine puissance, sans problème, tout en réchauffant le shack-radio. Heureusement que le 136 kHz est plutôt une bande d’hiver: le monde est bien fait.

Station 136 kHz
Hafler P3000

Mais quelle puissance, en fait ?

En audio mono, il est donné pour un 400W avec une charge de 8Ω. Sauf que là, nous ne sommes pas en audio, mais en HF !

Il en résulte qu’à pleine puissance, outre de la distorsion qui va générer des harmoniques indésirables, il sature et bascule d’un coup en auto-oscillation : une alerte « Clipping » est alors indiquée sur le panneau de contrôle, un fort bruit inquiétant est perçu dans l’ampli lui-même et le spectre radio électrique se charge d’un QRM (brouillage) infernal.

A noter que le « Clipping » peut être aussi déclenché par une désadaptation d’impédance de l’antenne.

Heureusement, après quelques secondes de « Clipping », l’ampli bascule automatiquement en mode sécurité et se coupe pour ne pas détériorer ses étages de puissance. Ouf !

A croire que Mr Hafler avait prévu une utilisation en radio, avec une charge qui pouvait varier d’un coup accidentellement ?

Malgré une connexion soignée de chaque élément de la chaine d’amplification vers une terre spécifique, il n’est pas possible de lui faire sortir ses 400 W sur 136 kHz. Sur une charge résistive, il s’en approche, mais pas sur une antenne prévue pour rayonner. Dommage !

Un -3 dB est donc appliqué par défaut à l’amplification, ce qui laisse de la marge: avec 200W de sortie, le signal reste propre (linéaire) et le système tolère sans difficultés les changements d’impédance de l’antenne, qui immanquablement auront lieu en fonction de la météo, du vent, de l’humidité du sol, etc. Il n’est pas simple d’anticiper une variation de l’impédance, lorsque le système fonctionne non-stop plusieurs heures, au cours de la nuit, par exemple.

Quid des 1W PIRE ?

La réglementation nous limite sur cette bande à 1W « Puissance isotrope rayonnée équivalente ».

Avec le rendement déplorable de l’antenne, rassurez-vous, nous sommes dans les clous : la puissance rayonnée est voisine des 100 mW.

On remonte l’impédance.

Mais cette puissance est donnée pour une charge de 8Ω, or nos lignes coaxiales sont en 50Ω. Il faut donc concevoir un adaptateur d’impédance 8Ω / 50Ω, capable de fonctionner sur 136 kHz (et accessoirement 472 kHz) et qui pourra aussi supporter la puissance de sortie de l’ampli.

Pour cela, j’ai repris les plans de W1WD et j’ai construit ce qui avait déjà fait ses preuves (voir « sources » en bas de cet article) :

Station 136 kHz
Adaptateur d'impédance: schéma

Station 136 kHz
Adaptateur d'impédance 8Ω / 50Ω

Station 136 kHz
Adaptateur d'impédance: boitier fermé

Filtrage et vérification d’accord

Ce n’est pas parce que l’ensemble de la chaine d’amplification (TX / transverter / ampli) est linéaire qu’il faut s’abstenir d’appliquer un filtrage soigneux pour ne pas perturber les autres utilisateurs du spectre radio-électrique, d’autant qu’au dessus, il y a de la radio-navigation aérienne (balises NDB) :

Station 136 kHz
Filtre passe bas 136kHz

J’ai fréquemment un scope-match de connecté sur la sortie de l’ampli. Je vous laisse voir ça de plus près, ici.

J’utilise aussi un phasemètre qui avait été fabriqué par Nicolas F4DTL pour sa station (merci, Nico !). Il me permet de contrôler l’accord d’impédance de l’ensemble bobines de charge + antenne, en temps réel, avec un simple galvanomètre. Un filtre passe bas y est également présent, limitant au maximum les risques de perturbation dues aux harmoniques.

Fun fact : une caméra filme souvent le galvanomètre, ce qui me permet d’avoir toujours un regard, même à distance, sur le réglage de l’aérien lors des périodes d’émission et de couper les transmissions si besoin.

Oui, vous avez bien vu sur la photo ci-dessous: ma caméra possède un verre correcteur pour l’aider à lire plus facilement de près. La presbytie touche aussi les caméra lorsqu’elles avancent en age !

Station 136 kHz
Phasemètre F4DTL et capture vidéo

Commutation relais 2

Après le filtrage, on retrouve ici notre lien direct vers la chaine de réception qui ne passera pas par l’ampli Hafler.

Mais il m’arrive aussi d’installer les filtres après cette commutation, afin de limiter la force de signaux indésirables en réception (souvent les signaux de radiodiffusion en provenance des Grandes Ondes ou Ondes Moyennes, qui ont tendance à transmoduler, surtout la nuit).

Cette commutation est automatique, comme la « Commutation relais 1″.

Station 136 kHz
Commutation relais 2

A l’extérieur

A l’extrémité de 15 mètres de câble coaxial Ecoflex10, l’adaptateur d’impédance situé au pied de la bobine me permet de transformer le 50Ω de la ligne en 30 à 240Ω en fonction des besoins.

Pour la configuration 136 kHz, j’utilise généralement la position du 50Ω vers 80Ω et j’utilise toutes les spires de la première bobine de charge, qui est celle du 630m. Au total, ça nous fait : 130 spires de diamètre 200mm = 1.164 mH +/- la valeur du variomètre. Le fil de terre en bas à gauche de la photo est relié à une prise de terre située à cet endroit, + une dizaine de conducteurs de 4 à 20m de long qui passent sous le gazon, eux même reliés à d’autres piquets de terre à leur extrémité + mise à la terre des grillages de séparation avec les voisins.

Station 136 kHz
Bobine + adaptateur d'impédance

La sortie de la première bobine est reliée à l’entrée de la seconde bobine de charge (99 spires sur diamètre moyen de 330mm, qui fait 2.800 mH +/- la valeur de son variomètre), placée sur une petite table pour l’isoler un peu des effets du sol et des risques d’amorçage électrique, car nous avons là sur cette bobine une tension de plusieurs kV. Et ne vous y trompez pas, malgré l’isolant du fil, ça peut amorcer à moins de 10 cm de distance vers un lien relié à la terre, lien qui peut être un corps humain par exemple, et une brûlure de HF ce n’est pas agréable du tout, croyez moi !

La petite spire en « queue de cochon » en haut, à la base du fil d’antenne est d’utilité purement mécanique: elle permet à l’antenne de se balancer au gré du vent, sans forcer sur la connectique de la bobine: il est plus facile d’accompagner un mouvement avec souplesse que d’y résister.

Plus d’info sur la construction de cette bobine, ici.

Station 136 kHz
Bobine complémentaire 136 kHz

Enfin, arrive l’antenne et son chapeau capacitif.

L’antenne en elle-même ne fait que 10m de fil vertical, pour une longueur d’onde de 2200m, n’oublions pas, soit 0.45% de la longueur d’onde !

(Vous comprenez pourquoi, même avec 200W en sortie de PA, on respecte tout de même la réglementation des 1W PIRE ?)

Le chapeau capacitif horizontal ne rayonne pas vraiment : les signaux que les 5 fils de 16 mètres de long transmettent, le sont en opposition de phase avec ceux rayonnés par un conducteur virtuel, placé en miroir: la terre. Il faut voir cela comme un gros condensateur, qui permet d’augmenter l’inductance des bobines donc la tension électrique présente dans le circuit, et au final d’améliorer le rendement de l’antenne.

Station 136 kHz
Antenne_136kHz : schéma de principe

Station 136 kHz
Antenne L inversé de type Marconi, avec chapeau capacitif

Avec tout ce petit bazar, il est alors possible de transmettre des signaux sur une bande peu habituelle et d’expérimenter d’autres techniques et découvrir d’autres effets de Dame propagation.

Station 136 kHz
TX/RX F4guk en WSPR et FST4W du 14 nov 2021 sur 136 kHz

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Conclusion

Si vous avez envie de vous y mettre, vous aussi, et que vous aimez construire : visez un petit kit de chez QRP-Labs, tel que l’Ultimate3/3S comme générateur de signaux 136 kHz et 472 kHz. Ce petit appareil est fabuleux.

Il existe de multiple solutions simples pour l’amplification, qui n’a pas besoin d’être linéaire.

Vous pourrez toujours utiliser votre transceiver décamétrique comme récepteur (si celui-ci n’est pas trop sourd sur le 136 kHz). Faites courir un bout de fil dans le jardin ou depuis votre balcon, et amusez-vous avec cette méthode de radio « à l’ancienne ».

Vous pouvez aussi vous exercer en réception sur un SDR en ligne, tel que celui de l’université d’Utwente qui fonctionne bien sur le 136kHz.

Sur ce SDR ou sur votre récepteur, calez-vous sur 136 kHz en USB et pensez à bien réduire la largeur de bande de réception, pour limiter les effets des forts signaux du système EFR teleswitch européen, car la bande radioamateur du 136 kHz est « coincée » entre deux de leurs gros émetteurs HGA22 et DCF39.

Station 136 kHz
On voit bien les forts signaux des stations teleswitch de part et d’autre de la bande radioamateur

Vous verrez que la nuit les signaux sont plus forts, mais que la transmodulation des stations de radiodiffusion sur les Grandes Ondes (ou celle des teleswitch) y est parfois envahissante. Les orages aussi, même situés à 1500 kilomètres de chez vous, peuvent détériorer votre réception.

Donc ne vous découragez pas: si ça ne fonctionne pas un jour / une nuit, ça marchera mieux une autre fois.

Les modes les plus utilisés par les radioamateurs européens sur cette bande sont : WSPR « normal » (120s), OPERA mais également FST4W 120s / 1800s ou d’autres modes comme l’EbNaut qui est le champion pour les communications transatlantiques.

Et au milieu de tout ça, il y a moi qui tente régulièrement des CQ en JT9, juste en dessous de la bande prévue pour le WSPR !

Alors si vous m’entendez sur cette bande, n’hésitez pas à me faire un coucou !

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Mes objectifs d’amélioration sur cette bande:

- Construire enfin une bobine unique dédiée au 136 kHz avec variomètre motorisé.

- Trouver un jour un Hafler 9505 (le grand frère du P3000) pour poursuivre mes essais avec un peu plus de watts linéaires.

- Augmenter mon nombre de QSO « 2-ways » en JT9 ou FST4.

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Sources d’inspiration pour l’utilisation d’un ampli Hafler sur le 136 kHz (Really a BIG thanks guys !) :

W1VD page 1W1VD page 2W1TAG

Inspiration bobine 630m F6HCCEbNaut

 

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